Ceux qui ont déjà voyagé au Maroc ou dans le sud-est asiatique, ont, certainement, été fascinés par le spectacle de charmeurs de serpents. Voilà des animaux, parmi les plus dangereux et impossibles à domestiquer, qui réagissent au son de la flûte du charmeur en sortant du panier et se mettant à danser. Mais à bien y voir, tout ceci n'a rien de magique. Tout peut s'expliquer quand on connaît un peu les particularités du serpent. Et en explorant un peu ce qu'il y a derrière cette pratique, on se rend compte que tout n'est pas si rose.
Comment font les charmeurs de serpents ?
Charmer les serpents est une pratique qui vient de l'Inde. Dans la société indienne, il y a une sous-caste, les sapera, qui, quoique n'occupant pas une place importante sur l'échelle sociale, était connue pour son travail avec les serpents. Ce sont les membres de la caste qui capturent les serpents et soignent les morsures. Il faut dire que le serpent, plus particulièrement le cobra, occupe une place importante dans la mythologie indienne. Comme beaucoup d'animaux, il est sacré et on le voit d'ailleurs, autour du cou d'une grande divinité hindoue. Avec le développement du tourisme, les membres de la caste ont trouvé un moyen pour se faire de l'argent en se servant de leurs connaissances des serpents.
- Les serpents n'entendent pas la musique, contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire. Ils n'ont pas d'oreille.
- Le serpent est sensible aux vibrations du sol. En tapant le sol avec le pied, le charmeur l'oblige à se mettre en position de défense.
- S'il n'entend pas la musique, il voit la flûte, appelée pungi en Inde. Ce dernier est souvent richement décoré de peinture pour mieux attirer l'attention du reptile. En fait, le serpent voit le pungi comme un adversaire et ne le quitte pas des yeux. En faisant bouger le pungi en face du serpent, tel un hypnotiseur, le charmeur lui fait faire une ondulation qui ressemble à une danse.
Pourquoi les serpents aiment la flûte ?
Les serpents sont presque sourds et ne réagissent pas aux sons. L'usage de la musique est anecdotique. C'est pour donner un côté plus théâtral au spectacle que le charmeur joue de la flûte. Dans l'imaginaire populaire, le serpent a toujours occupé une place prépondérante. Depuis le tableau de Jean-Léon Gérôme ou celui du Douanier Rousseau, la thématique du charmeur de serpent fascine le monde de l'art depuis le XIXᵉ siècle. Mais dans la réalité, tout ce que les gens pensaient savoir sur les actions du serpent ne veut rien dire de particulier. Les serpents n'aiment pas la musique et encore moins la flûte. Il n'y a ni magie, ni apprivoisement du serpent dans les spectacles de charmeurs. Tout peut s'expliquer logiquement.
Quelles conséquences pour les serpents ?
En Inde, l'activité des charmeurs de serpents est interdite depuis 1972. Mais comme c'est le principal moyen de subsistance des charmeurs, la pratique est tolérée. De plus en plus d'associations œuvrant pour le bien-être animal essaient de sensibiliser sur la souffrance animale. La raison principale derrière l'interdiction de 1972 était l'effet négatif d'une telle pratique sur les animaux. Car les serpents sont vraiment affectés lors de ces spectacles, que ce soit à Marrakech ou dans les rues des grandes villes en Inde. Certaines pratiques cruelles peuvent même mener au décès des animaux.
- Pour se prémunir des morsures, certains charmeurs n'hésitent pas à coudre la bouche de l'animal, avec tout ce que ça comprend comme risques.
- Une autre pratique, aussi cruelle, consiste à arracher les crocs de l'animal.
- Les glandes de venin sont parfois percées. Aucune précaution particulière n'est prise lors de cette opération et aucun soin n'est apporté après.
- Le serpent reste dressé pendant presque tout le spectacle. Cela lui demande beaucoup d'énergie et finit par l'épuiser. Ce stress conduit à la mort après seulement quelques mois.
- La vie d'un serpent, qui participe contre son gré à ces spectacles, n'est pas de tout repos. Entre les périodes d'enfermement au fond d'un panier et les manipulations en position de défense, le niveau de stress est très haut, surtout qu'un dresseur de serpent ne prend aucunement en compte son bien-être et ses besoins.
Toutes ces pratiques cruelles ne sont rien d'autre que de la maltraitance envers ces animaux. En fin de compte, les serpents développent des abcès et meurent des suites d'infections. Le ressenti de la douleur chez les reptiles est de plus en plus reconnu. Les spectacles de charmeurs de serpents sont jugés brutaux et cruels, indignes d'un monde civilisé parfaitement informé de la souffrance animale et du besoin de se préoccuper du bien-être des animaux. On se rend compte que les serpents ne dansent pas, mais paniquent. Avec cette prise de conscience, il est essentiel de tout faire pour abolir ces spectacles de nos sociétés.